Ce que nos films préférés révèlent de notre état émotionnel

Victoria Lopes

La manière dont nous choisissons nos films ou nos séries n’est jamais neutre. Bien au-delà du simple divertissement, nos préférences audiovisuelles sont souvent le reflet d’un état émotionnel dominant ou d’un besoin affectif inconscient.

Différentes études en psychologie, neurosciences et sciences sociales suggèrent que ces choix s'inscrivent dans des stratégies de régulation émotionnelle, parfois inconscientes mais pourtant puissantes.

Les contenus audiovisuels comme miroir émotionnel

Selon une recherche menée à l’Université du Québec à Montréal (UQAM) et à l’Université catholique de Louvain (UCLouvain), les contenus médiatiques sont fréquemment utilisés pour moduler notre humeur ou canaliser des états émotionnels latents.

Par exemple :

  • Les comédies sont souvent recherchées pour leur effet immédiat sur le soulagement du stress et de l’anxiété.

  • Les drames émotionnels servent de catharsis et aident à traverser des émotions comme la tristesse, le manque ou le deuil.

  • Les thrillers et films d’action stimulent la décharge de tension liée à la colère ou au surmenage.

  • Les romances répondent à un besoin de sécurité affective, de connexion ou de tendresse.

  • Les films d’horreur permettent d’explorer ses peurs inconscientes dans un cadre symboliquement sécurisé.

  • Enfin, le fantastique ou la science-fiction sont souvent des refuges d’évasion mentale, utiles face à un vide existentiel, une routine pesante ou un besoin de transcendance.

Régulation émotionnelle et adaptation psychologique

Ces usages ne sont pas pathologiques. Au contraire, ils montrent que nous utilisons des mécanismes naturels de gestion émotionnelle. Ce phénomène, que les chercheurs qualifient de “coping médiatique” (Zillmann, 1988), désigne la manière dont les individus utilisent les médias pour maintenir un équilibre psychologique.

En pratique, cela signifie que votre film du soir pourrait bien vous en dire long sur ce que vous vivez intérieurement, parfois sans que vous en ayez conscience.

Références

  • Zillmann, D. (1988). Mood management: Using entertainment to full advantage. In L. Donohew et al. (Eds.), Communication, social cognition, and affect. Lawrence Erlbaum.

  • Oliver, M. B., & Raney, A. A. (2011). Entertainment as pleasurable and meaningful: Identifying hedonic and eudaimonic motivations for entertainment consumption. Journal of Communication, 61(5), 984–1004.

  • Laforest, J., & Paquette, S. (2020). Utilisation des médias et stratégies de régulation émotionnelle. Revue québécoise de psychologie, UQAM.

En séance : un outil d’exploration symbolique

En accompagnement thérapeutique, que ce soit en coaching ou en thérapie brève, ces contenus peuvent devenir de véritables leviers d’exploration. Évoquer les récits, les personnages, ou les univers auxquels une personne s’identifie permet d’accéder à des représentations symboliques, souvent plus riches et plus souples que les mots.

Le cinéma et les séries deviennent alors des portes d’entrée vers l’inconscient, un langage émotionnel indirect mais hautement révélateur.

Conclusion : Apprendre à observer ce qui nous attire

La régulation émotionnelle passe par de nombreux canaux. L’un d’eux, souvent négligé, est celui de nos choix culturels. Apprendre à observer ce qui nous attire et pourquoi permet de mieux se comprendre, de mieux se respecter, et parfois, d’ouvrir la voie à un véritable travail intérieur.